Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/263

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— Écoutez, reprit Wolfran, je vais vous dire une légende, presque un évangile : Il y avait une fois une archiduchesse belle comme le jour…

Il s’efforçait à sourire, mais des larmes montaient à ses yeux et démentaient l’enjouement qu’il eût voulu garder. Il continua :

— Elle était aimée d’un jeune prince comblé des dons les plus charmants de l’esprit et du cœur, et elle le chérissait peut-être plus encore qu’il ne l’aimait lui-même. Leur tendresse avait la douceur, l’héroïsme et la pureté de celle qui a rendu immortelles les plus poétiques amours du passé. Ils ne vivaient que l’un de l’autre. Mais l’archiduchesse portait en elle en grande partie les destinées de son pays. Il n’était pas bon qu’elle s’unît à son prince. Les raisons les plus hautes, les plus redoutables le défendaient…

— Ah ! quelles raisons ? s’écria Clara qui devenait anxieuse et qui se refusait, comprît-elle tout le système royaliste, à admettre cette clause des mariages politiques.

Et le père, dont la voix tremblante n’était plus qu’un chuchotement, continua, torturé :

— Ici, la légende devient secrète, et seuls la connurent ceux que leur rang, leur naissance ou simplement leur mérite faisaient les naturels confidents des princes. L’archiduchesse était la fille d’un roi auquel des devins avaient annoncé qu’il mourrait prématurément ; elle-même jouissait de la vie comme d’un bien précaire ; ce