Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/271

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avaient été arrêtées. L’Union, privée de ses chefs, était profondément atteinte. Un formidable procès s’apprêtait. Des correspondances étaient saisies partout. Mais Clara avait beau boire à haute dose la liqueur révolutionnaire, elle n’en recevait plus l’excitation et restait froide devant les mesures policières. Elle ne lisait pas un mot qui ne sonnât trop fort ou qu’elle ne vit immédiatement réfuté par l’esprit clair, légèrement sceptique et froidement raisonneur de Wolfran. Quand elle n’allait pas le voir, c’était lui qui, par le souvenir, venait à elle, lui imposant invisiblement sa pensée, discutant la sienne, l’asservissant chaque jour davantage.

Elle recourut alors à un volume d’une virulence toute particulière, écrit contre le pouvoir royal, et où elle pensait trouver des armes contre l’assujétissement intellectuel qu’elle subissait. Publié une vingtaine d’années auparavant, il avait été interdit lors de l’avènement de Wolfran V au trône, retiré du commerce et impitoyablement arraché à ses propriétaires lors de toute inquisition policière dans les demeures privées. C’était le Servage, ou Traité de la condition des peuples régis, petit volume où les initiés prenaient plus de délices depuis qu’il encourait une si sévère prohibition. Clara, grâce à de pieux subterfuges, avait pu conserver l’exemplaire du docteur Kosor, malgré les fréquentes visites que rendait le chef de la Sûreté à la maison