Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/288

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humains, leur violence et la mystérieuse puissance qui est à leur service, à l’état de ressort dans l’individu, on reste confondu qu’un ordre relatif règne en somme parmi les sociétés humaines. Cet ordre est très remarquable. Il indique le sens social de notre animal, sens qui contre-balance heureusement la férocité de l’égoïsme. Alors que toutes les ardeurs de l’âme humaine tendraient au désarroi général, et qu’en bonne logique on devrait voir les hommes, suivant leurs instincts, s’égorger, se piller, s’incendier, se détruire, exercer des vengeances innombrables, s’approprier tout ce qu’ils convoitent chez autrui, c’est le contraire qu’on observe et, sans se beaucoup entr’aimer, les hommes vivent en assez bonne intelligence dans les cités, dans la nation. Les forces mauvaises sont assoupies dans la foule, les mouvements destructeurs sont suspendus dans cet océan ; tout est au calme. Et la cause de ce bien-être est une toute petite et fragile faculté qui compte peu en apparence dans l’individu, qu’on ne peut apprécier que dans les collectivités, c’est la sociabilité naturelle défendue et nourrie par les lois. Mais que ce lien délicat qui attache les hommes vienne à se relâcher, que le charme soit rompu, vous les verrez se ruer les uns sur les autres. C’est l’histoire des révolutions. Un chef d’État qui a la responsabilité de cet ordre nécessaire, ne réfléchit pas sans épouvante, même en temps de paix, à