Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/311

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— J’ai gardé, murmurait Ismaël, les plans de Goethlied. Ils sont bons je les maintiens. Mais c’est le système d’action que je changerai. Un homme s’est opposé à l’expansion de notre œuvre d’amour ; enhardi par un premier succès, il renforcera sa défense. En lui réside l’obstacle unique, la barrière éternelle qui brisera notre effort. La ligne de conduite est nettement indiquée, cet homme doit disparaître. Comment, je ne sais encore, mais…

— Quel homme ? interrogea Clara d’une voix dure.

— Tu ne le connais pas, gronda Ismaël ? celui qui a fait fusiller de sang-froid les affamés venus pour réclamer du pain et du feu, celui qui sème la discorde dans le pays, celui qui m’ôte ma liberté, qui jette aux fers les plus nobles humanitaires, qui a piétiné, comme on piétine une fourmilière, la société des esprits les plus élevés, des cœurs les plus tendres, des êtres les plus généreux. Celui qui ploie, sous son autorité grossière de potentat satisfait, douze millions d’hommes libres réduits à la condition d’esclaves…

Il ne la vit point à cette minute, et c’est ce qui la sauva. Il attendait qu’elle répondit, qu’elle eût un cri de surprise, l’émotion de la faiblesse féminine devant l’idée de meurtre, mais elle ne desserra pas les lèvres. Néanmoins il s’efforça de développer son idée pour la rendre acceptable. J’ai longtemps professé le respect de la vie