Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/319

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presque une allégorie. C’était Wolfran, une âme, experte en toutes les misères humaines, sensible à toutes les fines émotions du cœur, passible de tous les mouvements de violence… Et la reine avait parlé de tous ceux qui l’aimaient… Qui l’aimai ? Le peuple. Mais la reine n’avait pas pensé au peuple ; elle avait voulu dire un petit cercle très étroit, resserré autour de lui, même pas la cour, même pas les familiers, quelques personnes seulement celles qui s’abîmeraient dans une douleur insondable le jour où l’on ramènerait au palais, blanc comme un marbre et empourpré de sang, ce corps royal si noble et que la pensée spiritualisait ; elle Gemma, l’archiduchesse, Bénouville, si maternelle, et qui encore ? Qui aimait Wolfran ?

« Moi, songeait Clara, moi qui suis son amie au sens le plus grand, le plus doux et le plus pur. Nul ne l’a jamais compris comme moi. Cette amitié intellectuelle qui s’est nouée entre nous, il s’en est servi pour établir entre lui et moi l’union de pensées, et il se trouve que j’ai évolué comme il a évolué lui-même ; nos esprits sont semblables, nul n’est si près de lui que moi. Ah ! cette amitié me place bien au nombre de ceux qui revêtiraient à sa perte le plus cruel deuil de l’âme. Il est mon soleil. S’il disparaissait ! S’il disparaissait !… »

Et les yeux levés sur lui, avec la candeur d’un enfant et la force passionnée d’une femme, devant