Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/352

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loppe dont la suscription était d’une écriture dénaturée. Elle frémit en l’ouvrant et reconnut la lettre-procédé d’Ismaël. Il lui disait : « Si tu te souviens encore, ma Clara, de l’attachement qui nous a liés trente années, viens me voir une dernière fois. C’est la suprême grâce que je te demande, moi qui ne regrette que toi dans la vie… »

« Quoi ! se dit Clara, toute secouée encore de la commotion qu’elle venait de recevoir, va-t-il donc mourir ?… » Et elle le vit malade, agonisant dans la misérable chambre dont il lui donnait l’adresse, seul, sans secours, sans garde, sans soins, mourant peut-être même du coup qu’elle lui avait porté, en se détachant de lui.

Elle oublia les transes dans lesquelles il l’avait contrainte à vivre depuis cinq mois, cette menace terrifiante qu’il avait suspendue sur le roi, ce péril caché dans l’ombre dont la hantise la poursuivait nuit et jour. La bonté de son cœur seule la conseilla. Elle s’habilla en hâte, commanda sa voiture, se fit conduire à la cathédrale, ressortit par une porte latérale, suivit à pied la rue de l’Archevêché et aboutit au quartier malodorant où se cachait Ismaël Kosor.

Il l’avait accoutumée à ses logis sordides, mais elle en avait perdu l’habitude et elle n’en conçut que plus de pitié pour celui qui lui lançait, de cette abjection, un appel si désespéré. Qu’elle était émue en montant l’escalier inconnu ! Et elle