Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/368

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Elle rentrait au palais comme une bête blessée qui regagne son gîte. C’était dans sa chambre solitaire qu’elle voulait aller se terrer. Interrogée, elle aurait répondu : « Je vais chez moi. » Mais à peine eut-elle posé le pied sur l’escalier de la rue aux Juifs, le souvenir d’Ismaël s’abolit en son esprit, il s’évanouit en elle comme une image qu’on efface. Il ne resta plus de vivant à ses yeux que la vision de Wolfran. Et dans une légèreté de songe, c’est vers les appartements royaux qu’elle se dirigea.

Dans le vestibule le premier valet de chambre du roi lui dit :

— Sa Majesté ne va pas pouvoir recevoir mademoiselle Hersberg. Sa Majesté regrettera, j’en suis sûr…

Elle se prit à sourire à ce malheureux, si loin de la réalité, si loin de la vérité, et elle affirma ;

— Mais si, mais si, il faut bien que Sa Majesté me reçoive.

Le discret personnage eut un geste de protestation : elle passa outre. À cet instant, le colonel Rodolphe sortait de son cabinet, voisin de celui du roi. Elle répéta avec une énergie de démence :

— Il faut que Sa Majesté me reçoive.

L’aide de camp, si correct, resta muet devant le visage bouleversé de la savante. Il n’osa rien demander. Seulement, quand il vit la jeune femme se diriger vers l’antichambre, il hasarda :