Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/370

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— Sire, que Votre Majesté me pardonne…

Une timidité semblait clore ses lèvres. Alors, le roi lui parla avec bienveillance, familièrement, lui demanda si elle avait diné, et, comme elle faisait signe que non, voulut qu’elle s’attablât en face de lui.

— Nous causerons mieux ainsi, disait-il.

Elle obéit sans répliquer et elle pensait : « Je ne l’aime pas, je ne l’aime nullement. Pourquoi sacrifier l’ami le plus cher ?… »

Et, à l’instant même où Wolfran épiait ce visage singulier, dont il voulait forcer le secret, elle proféra péniblement :

— Votre Majesté court un grand danger.

Sans doute s’attendait-il à autre chose, car il fit un geste d’allègement ; sa physionomie s’éclaira et il dit :

— Vous êtes bonne de vous inquiéter pour moi, chère mademoiselle Hersberg ; mais je suis sur que vous vous alarmez à tort et pour des périls imaginaires.

Il ne l’avait jamais trouvée si belle ; ce feu caché qui l’animait lui donnait une surabondance de vie ; le léger halètement qui soulevait sa poitrine, son émotion, dévoilaient la sensibilité de cette femme de science, aux apparences impassibles. Il était heureux de l’avoir à sa table, dans cette intimité de bons amis, lui qui nourrissait pour elle un sentiment si particulier, confinant de très près au romanesque. La voir, au sur-