Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/371

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plus, si occupée de lui, le charmait. Et, comme il la contemplait avec admiration, il s’aperçut que ses traits se décomposaient, qu’un tremblement nerveux la secouait : elle était devenue livide et murmurait :

— Demain…, Votre Majesté doit être frappée.

— Vraiment ? dit-il, déjà moins incrédule et gagné par l’anxiété de cette femme bouleversée. C’est donc sérieux ?

— C’est maintenant fatal, continua-t-elle d’une voix sourde. À moins que…

Wolfran lui vit au front des perles de sueur. Il réfléchit quelques secondes ; puis, soudain, en présence de ce qu’endurait Clara, il eut une révélation. Ce fut si brutal que, var un réflexe, son poing s’abattit sur la table :

— Mais oui, je comprends, je sais tout : c’est lui, Kosor, n’est-ce pas ?

Sans répondre, elle frissonna et se voila le visage à deux mains. Dans un de ces rapides coups d’œil qu’a l’esprit humain quelquefois, elle considérait d’ensemble toute sa vie, du jour où une infirmière de l’hospice l’avait déposée, enveloppée de langes, entre les bras du petit Ismaël, jusqu’à la minute présente où, tête à tête avec le souverain, elle dénonçait implicitement le frère et l’ami qu’avait été pour elle le malheureux rêveur. Ah ! que d’heures tendres, quel dévouement, quelle religion il avait eus pour elle ! Elle avait partagé son pain, sa science, ses