Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/61

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Et, militairement, il se retira avec l’impersonnalité de ceux qui parlent au nom d’un autre. Visiblement, le vieux royaliste n’avait point parlé là au sien. La libertaire ne lui avait pas inspiré cette confiance étrange qu’il avait plu au Maître de ressentir pour elle. Il avait délivré son message dans son obéissance absolue de vieux courtisan au bon plaisir du jeune souverain et Clara avait senti en l’écoutant son inimitié. Mais la nervosité de mademoiselle Hersberg avait d’autres causes qu’elle ne démêlait pas. Sa réponse était prête : elle n’était pas du bois dont on fait les dames d’honneur, et il y aurait eu trop criante apostasie dans le fait d’aller, elle, la libre Hersberg, jouer. son rôle dans la comédie pompeuse, de l’autre côté de la rue… Hésiter, discuter, elle n’y pensait même pas. Mais alors, pourquoi être si troublée ?

Elle demeurait là, oubliant l’expérience en cours. Elle se souvenait de la leçon sur le thermium et de l’auditeur à barbe rousse dont elle s’était si peu souciée, dès qu’elle l’avait su le souverain. Alors elle cherchait à ressusciter en sa mémoire la petite archiduchesse. Ah ! oui, elle revoyait tout à coup la longue main aux phalanges osseuses, le grand front bombé, les yeux très caves, très bleus, très doux et très ardents. Et elle se rappelait comme la jeune fille s’était écriée en recevant dans le creux de sa main le petit grain de thermium :