Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/95

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chaises d’acajou. Des congrès s’y étaient tenus pour bouleverser la face du monde, tout enfant, elle y avait vu siéger, terribles et passionnés, les amis de l’éternel révolutionnaire. Il lui semblait que c’était encore le sanctuaire de la grande Idée. Mais ici quelle frivolité ! Et elle soupira en ouvrant encore une porte.

Cette fois elle se rasséréna. Une muraille à six pans, dont chacun se creusait d’une fenêtre en ogive, enclosait une grande pièce vide, dallée et froide, mais immense et lumineuse. C’était l’ancien atelier de Wolfran qui, enfant, y avait appris la menuiserie. Clara comprit que son laboratoire serait là et qu’elle y exercerait un empire que le souverain ne connaissait pas, certes, quand il régissait, souvent illusoirement, la nation. Sa vraie demeure serait ici. Un banc de bois y était resté sans avoir même ôté son chapeau ni ses gants, elle s’y assit et pensa…

Son âme était triste. Elle se sentait changer de vie. Un peu d’elle-même venait de mourir. Et ce sombre palais dont la mystérieuse lumière humaine, le roi, restait secrète, invisible, ne ressemblait plus qu’à une énorme administration, une vaste communauté. Ah ! le naïf Ismaël, qui avait cru que son influence de savante métamorphoserait ici l’engrenage social dès qu’elle aurait posé le doigt sur la cheville du mouvement initial le souverain. Le souverain ? Il paraissait n’exister que virtuellement ici. C’était un prin-