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Page:Yver - Le Mystere des beatitudes.djvu/31

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fréquent des autobus. Un silence relatif régnait, les fourmis en plus petit nombre entraient dans les fourmilières du Métro et en sortaient de leur même mouvement stupide. La fumée rousse s’étendait sur toute la ville, comme un nuage lumineux rasant les toits. Et la façade de l’Opéra ressemblait à un palais de songe éclairé par un clair de lune fantastique. Muzard pensait des choses qu’il ne disait plus. Il devait penser au ruissellement nocturne de l’argent qui allait maintenant commencer, à cette apothéose de la richesse qui éclaire les nuits parisiennes et qui fait la puissance fascinatrice de l’Idole. Solème le ramena aux contingences :

— Pourquoi as-tu pris en grippe cette malheureuse Ninette, qui est bonne fille au fond ?

— Je ne l’ai pas prise en grippe, dit Muzard, mais je me méfie d’elle comme je me méfierais de Loche, si j’avais un capital à sauvegarder. Je ne possède qu’une chose, moi, et j’y tiens. C’est la paix, ma paix de vieux garçon qui ne veut pas introduire de femme dans sa vie. As-tu remarqué, mon cher, qu’elle tourne plus autour de moi que de toi ? Pourtant, tu es un beau gars, tu as le type et la douceur séduisante des Scandinaves, chose très prisée. Moi, je déplais aux femmes. Mais une ironie de la vie a fait, de l’imaginatif que je suis, un aligneur de chiffres, et du pauvre diable contempteur de l’Argent, un caissier entre les mains de qui l’argent coule sans cesse. Et c’est ma