Aller au contenu

Page:Yver - Les Cervelines.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

voilette blanche, que la voiture a déposée chez elle en passant, qui était-ce ?

— C’était vous ! murmura Cécile, délicieusement remué.

Après cette soirée, il passa trente-six heures dans l’état le plus troublé qu’il eût jamais connu. L’idée de ce mariage, maintenant résolu sans qu’il pût en douter, le remplissait d’épouvante. Il se jugeait fou d’avoir pris, sans que la passion la justifiât, cette formidable initiative. Il lui semblait que sa vie allait se rompre.

Il profita de son séjour à Paris pour prendre toutes les distractions qu’il put, étant forcé de mener à Briois la vie austère du médecin très observé. Puis le surlendemain, il reçut à son hôtel ce télégramme de Ponard :

« Mon pauvre ami, je joue de malheur avec vous ; Bassaing vous trouve charmant, mais il exige pour sa fille une fortune personnelle qui permette à son gendre de venir s’établir ici, et qui n’est pas la vôtre. La maman est au désespoir, car vous lui aviez tout à fait tourné la tête, et la petite ne cesse pas de pleurer depuis, enfermée dans sa chambre. Bassaing est impitoyable, je ne le comprends pas et ne le lui ai pas envoyé dire. Venez déjeuner. »

D’abord, Jean eut une longue aspiration libre, comme s’il venait de franchir le seuil d’une prison. Ainsi, tout ce qui le terrifiait depuis deux jours ne comptait plus, sa vie n’allait pas changer, et la terrible, l’écrasante initiative n’aurait pas de suite. Ce fut une saveur de liberté qu’il dégusta toute une longue minute. Puis le chagrin de la pauvre petite Blanche qui le pleurait l’at-