Page:Yver - Les Cervelines.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le bacille mystérieux. Il l’avait conduite dans le midi, il se flattait de l’aller chercher, guérie, en mai prochain, et voici que Jeanne Bœrk disait : « Elle est perdue ! »

— Je l’avais connue enfant, murmura Cécile en se tournant vers Marceline dans une émotion qui n’était pas dépourvue de coquetterie, elle était bonne et charmante, c’était une délicieuse fille.

— Oh ! la mort ! frissonna Mlle Rhonans.

— Elle est inacceptable, continua Cécile, elle me révolte, je ne m’y soumets jamais, je la hais toujours, mythologiquement, ainsi que les anciens, comme une personne.

Marceline le regarda très au fond des yeux.

— Vous souffrez beaucoup quand vous perdez un malade, docteur ?

— Oui, mademoiselle, je souffre égoïstement de mon impuissance contre la mort et de la répercussion qu’a en nous la mort des autres qui avertit.

— Ah ! mais, s’écria Jeanne, savez-vous que vous n’êtes pas gais ce matin ! Je n’ai pas amené ici monsieur Cécile pour entendre ces choses lugubres auxquelles on ne doit point penser.

— C’est ennuyeux, mais j’y pense souvent, moi, reprit Marceline ; je cherche à deviner : la religion éclaire tant la mort.

— Vous êtes religieuse ? demanda Cécile.

— C’est-à-dire, monsieur, que je ne suis guère que cela, ainsi que ce doit être quand on a vraiment reçu l’impression de la divinité. La foi vous repétrit un être moral, tout spécial ; c’est vraiment une vie nouvelle, un système qui vous régit l’âme.