Page:Yver - Les Cervelines.djvu/240

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de leur marche, aux parfums de leurs cheveux et de leurs corps, frottés de nard. Elle décrivit, d’après Thucydide, une messe païenne au temple de la déesse. On vit les colonnes immenses, les architectures lourdement abattues en moellons ruinés, sous les ronces, réédifiées en quelques mots fins de cette pittoresque imagination ; puis par plaisir, par une fantaisie de son âme religieuse, elle s’attarda à l’esprit de foi de ces assemblées possédées d’un culte ; elle réédifia l’architecture bien autrement poignante et précieuse de ces âmes. Elle négligeait, comme on le doit parfois, les formes extérieures du sentiment pour ne plus retrouver sous ces violences mystiques que l’universel et impérissable sens de la Divinité chez toute l’espèce humaine, ce qui était pour elle la lumineuse expression de Dieu. Elle dit à ce sujet des choses émues et infiniment hautes ; elle parla de la tendance eucharistique des Grecs. Les termes lui devenaient ici rares et difficiles ; elle se sentait parler à des intelligences qui ne la comprenaient plus, peut-être, ce qui est pour l’artiste le plus douloureux sentiment. Dans un travail violent de pensée, cherchant des mots qui rendissent sa théorie susceptible d’être entendue de tous, la tête posée sur une main et tournée machinalement, les yeux fixés, sans voir, vers un coin de l’amphithéâtre moins peuplé d’auditeurs, elle poursuivit :

— Le Grec, suivant un rite, plaçait sous ses aliments, à table, un gâteau de froment où il représentait le principe de la nature ; il l’appelait le Pain-Cérès. C’étaient, ces gâteaux, des Cérès, comme il disait…