Page:Yver - Les Cervelines.djvu/264

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à l’Hôtel des Sciences, de si fameuses conférences ?

— Certes oui : plusieurs de nos clientes sont ses élèves, et je t’avoue que je ne comprends guère l’engouement…

Cécile l’arrêta d’un mot.

— C’est elle.

Lentement, les yeux froids et cruels, Mme Cécile croisa les bras.

— Elle c’est de cette créature-là que tu es allé t’éprendre ? Toi si sensé et intelligent, avec ton expérience d’homme qui a vécu à Paris, dans le milieu le plus composite où tu aurais dû apprendre tout ? Toi Jean, songer à faire de cette femme savante ta femme ? Toi que j’ai entendu si souvent railler ces créatures phénomènes qui n’ont ni l’esprit d’un homme, ni le cœur d’une femme, des natures déformées, des têtes farcies de science, des âmes sèches…

Jean pensait aux tendresses de son amie, et ruisselait d’une joie intérieure de persécuté.

— Maman, permettez, dit-il, je l’aime.

— Tu l’aimes ! À dix-huit ans, mon enfant, c’est un argument pour se lancer dans une sottise, mais il y a quinze ans que tu ne les as plus, tes dix-huit ans ; et il ne t’est plus permis de compromettre ton bonheur sur ce mot-là, qui est un mot de caprice.

— Ce mot-là, reprit Jean avec une ferveur secrète, il se mesure à la taille même de celle qui me l’inspire. Si vous la connaissiez, Marceline !

— Tu la connais donc bien, toi ?

— Comme on peut connaître une âme limpide et sincère, se révélant d’elle-même à ceux qui la