Page:Yver - Les Cervelines.djvu/306

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des formules de sciences plus sagaces ou plus fortes que celles qui ont été dites jusqu’ici, j’apporte au mouvement général une pareille contribution, et vous oseriez dire que je ne fais pas mon devoir !

Séduite, conquise et émerveillée, Marceline regardait son amie.

— Vous êtes une Cerveline, lui dit-elle, en reprenant la parole même de Jean Cécile.

— Cerveline, quoi ? Ah ! oui ; cerveau… cervelle… je comprends : une Cerveline. Certes oui, j’en suis une et je m’en fais gloire ; quand on n’est pas une Cerveline, on a bien des chances pour être une écervelée. Ma pensée voit et pèse mes actes avant que je les accomplisse ; elle est la maîtresse de tout, et je ne laisse rien lutter contre elle. Mon cerveau me fait vivre moralement comme matériellement ; je lui suis un peu sacrifiée, c’est vrai ; je suis parfois lasse, fatiguée de tous mes membres et il me mène quand même ; mais il est bon prince et me paie richement ; je suis heureuse. Il n’y a que cela au monde être cérébral. C’est la loi du temps à venir.

— Entre la cérébrale et la Cerveline il y a une nuance, remarqua Marceline qui méditait ardemment en parlant ce problème brûlant de son existence même. On peut être d’une intelligence forte et créatrice, on peut être très occupée d’intellectualités, travailler mentalement sans cesse et connaître en même temps tous les autres courants de la vie ; les natures assez complexes pour participer à toutes les activités qui sollicitent l’être humain peuvent demeurer cérébrales. La Cer-