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Page:Yver - Les Cervelines.djvu/332

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battement de cœur, se tourna résolument vers la direction de sa maison, et se demanda tout une heure quelle force obscure l’avait retenue d’aller à lui.

Mais une fois chez elle, installée à sa table de travail, elle se sentit une telle paix au souvenir de cet acte de maîtrise sur sa passion, qu’elle prit goût à ces sortes de victoires.

Les joies abstraites lui revinrent ; elle prépara ses conférences avec un plaisir infini. Depuis l’époque où elle savait Cécile toujours présent à l’amphithéâtre, elle prit pour la première fois souci de son public ; elle se rappela les adulations dont il l’avait entourée, et quelque chose d’affectueux la reprit pour ces intelligences sympathiques qu’il lui parut charmant d’instruire.

Elle se rappelait souvent le mot de Jeanne Bœrk : « Sans mari ni enfants, je me trouve une femme absolument complète. »

— Les créations des gens de sciences, se redisait-elle aussi, les tiennent quittes de l’autre devoir vis-à-vis de la société ; ils sont affranchis.

Et elle se sentait sollicitée plus irrésistiblement que jamais par l’attrait de l’Asie-Mineure, ayant sans cesse sous les yeux la lettre du vieux Parisien qui disait : « Voyez donc ce que vous avez à faire, et comptez assurément sur le succès. » Si quelqu’un avait ces jours-là visité sa table de travail, il l’aurait trouvée encombrée de vieilles brochures, de notes, de photographies, de récits de voyages, d’itinéraires, tous ces matériaux concernant son rêve d’exploration.

Sa vocation d’historienne-philosophe refleuris-