Page:Yver - Les Cervelines.djvu/346

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prenez, dit-elle, il n’y a pas d’amour valable sans le mariage. Le mariage est le sens de l’amour ; ou alors…

Ils restèrent un moment, l’un en face de l’autre. ils avaient épuisé tous les mots possibles entre eux. La fin du drame se joua silencieusement. Marceline fut jusqu’au bout prodigieuse de force. Elle aimait encore ; Cécile le sentait, mais elle se ressaisit de minute en minute plus impitoyablement ; et ce qui dominait en elle, c’était cette irréfutable volonté contre laquelle tout se fût brisé.

— Marceline, s’écria-t-il à la fin, si vous ne vous laissez pas fléchir, ma mère fléchira ; elle reviendra sur sa décision ; il faudra qu’elle cède. Vous demeurerez la savante libre et glorieuse que vous êtes ; je respecterai en vous ce côté sacré de votre vie ; vous lui donnerez ce que vous voudrez et à moi le reste ; je me contenterais de si peu ! Pourvu que vous soyez près de moi dans l’existence, pourvu que j’aie votre présence, votre sourire…

Marceline secoua la tête.

— Il est trop tard ; l’épreuve est faite. On a voulu savoir à quel point me tenait ma vie intellectuelle ; c’est bien. J’aime trop mes livres, Jean, je suis mariée avec eux. Même un peu, je ne puis pas être à vous ; ce serait quelque chose de trop pauvre ; une vie mutuelle affreuse. Il me faut l’essor absolu.

Il ne savait plus qu’inventer ; il restait devant elle, la tête dans les mains.

— Monsieur Cécile, dit-elle doucement, presque avec tendresse, il faut vous en aller. Nous nous