Page:Yver - Les Cervelines.djvu/59

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instinct de suprême rouerie s’éveilla en elle. Elle lui tendit la main :

— Je vous ai laissé lire au dedans de moi, lui dit-elle, je vous ai loyalement montré mon âme et je vous ai fait mal ; ne m’en veuillez pas, dites ?

— Je ne vous en veux pas, madame, seulement je reprends le cours normal de ma vie, ma vie que vous aviez endiguée, captée en vous, au point que rien, rien…

Les mots ne sortaient plus de sa gorge, il fit une longue aspiration et reprit :

— Je retourne à Briois.

Elle fit :

— Ah !

Puis ses paupières tombèrent sur ses yeux humides, ses lèvres pâlirent, son visage rose se décolora.

— Mes parents, continua Cécile, me pressent de m’établir enfin là-bas. Qu’est-ce que je fais ici ? Gâcher ma vie !…

— Vous m’avez accusée d’être insensible, voyez ! dit-elle.

Et elle lui montra en face les vraies larmes de ses yeux.

Il eut un éclair d’espoir ; ce geste pouvait tant signifier. Il lui demanda, plein d’une fièvre telle qu’elle en eut une sorte d’effroi :

— Dites-moi de rester, et vous savez bien que je renonce à tout.

— Ponard, balbutia-t-elle, n’aurait demandé qu’à vous lancer ici ; la plupart de nos grands docteurs ne vous valent pas, il me l’a dit.

— Mais vous, vous, que me dites-vous ?

Elle détourna la tête sans répondre, en faisant