Page:Yver - Les Cervelines.djvu/93

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pointant une étoile unique en flamme dans le ciel décoloré, la flèche que la cathédrale invisible portait dans les nues.

— Tisserel, dit Jean Cécile, tu sais que ta sœur tousse.

— Henriette ? mais non, elle ne tousse pas.

— Comme tu voudras, mais elle tousse.

Paul se tourna vers sa sœur.

— N’est-ce pas que c’est un petit rhume de rien ?

— Mais oui, répéta Henriette dont la voix tremblait un peu ; monsieur Jean est bien bon de s’occuper de cela.

Lorsque Henriette était née, Jean, qui avait neuf ans, était déjà le camarade de son frère ce souvenir mettait entre elle et lui une amitié d’un tour spécial, qui n’était pas de l’intimité, parce qu’ils s’étaient vus très peu, mais quelque chose de familial, tiré de tant de réminiscences communes et lointaines. Son rôle de médecin ajoutait à cette facilité de leurs rapports ce que sa timidité glaciale y ôtait. Il se leva et s’en alla se placer devant elle.

— Montrez votre main ? fit-il, jetant son cigare.

Et quand il tint cette main moite et tiède, fiévreuse, au toucher morbide, il fut effrayé de percevoir les secousses des artères violentes, affolées d’émoi, qui battaient à brusques saccades dans sa main.

« C’est donc sérieux ! » pensa-t-il avec une pointe de fatuité et en même temps, il s’affligeait de ce symptôme qu’il avait reconnu à fleur de cette peau de jeunesse, dans la pauvre