Page:Yver - Les Cousins riches.djvu/208

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se retrouvaient là-haut tous les quatre en famille. Ils s’épanouissaient librement. Le mari, un pli d’amertume aux lèvres, fumait des cigarettes ; la revue qu’il allait lire demeurait ouverte devant lui et il mettait une coquetterie à ne pas bouger, à attendre sa femme qui ne redescendait souvent qu’au dîner.

Ce soir-là Samuel Alibert, en rentrant, avait embrassé Fanchette plus tendrement que de coutume. La tristesse de la petite sœur les ravageait, Frédéric et lui. Leur étonnement était sans mesure de rencontrer une adversité qui résistât à leur puissance. Un dérivatif même, leur argent n’avait pu l’offrir à Fanchette qui repoussait jusqu’à l’idée d’un voyage, d’une distraction. Elle restait là, inoccupée, ses yeux pâles, glacés à force d’être incolores, perdus dans l’espace. Quelquefois elle ouvrait ses livres de chimie. Jamais elle ne s’était plainte.

— Tu as l’air souffrante ce soir, mon petit, lui dit Samuel en adoucissant la voix.

— Je me porte très bien, Sam, je t’assure.

— Vous ne voyez pas ce qu’elle a ? intervint Cécile, mais elle est gelée ici, votre sœur, littéralement. On meurt de froid dans