Page:Yver - Les Cousins riches.djvu/276

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Le jardinier, à demi effrayé devant ce flot humain, crut à une grève, à une émeute, et se demandait que faire. Mais un des contremaîtres de la filature se détacha de la masse, prit les devants et vint lui parler à l’oreille. Le visage rasé, large et confit du jardinier se rasséréna. En signe d’intelligence, la tête dessina plusieurs oui successifs. Le bonhomme ouvrit à deux battants la grille massive du château. Déjà les premiers rangs de la cohorte avaient atteint le seuil. Le flot se précipita, s’engouffra dans le parc, s’amincit à la mesure des allées, s’étira en ruban autour de la pelouse centrale, et s’avançant alors avec circonspection, ralentit au moment qu’il atteignait de front la façade des Verdelettes flanquée de ses deux grosses tours à poivrière. Les voix, par discrétion, se faisaient chuchotement, mais leur concert produisait encore une clameur étouffée et profonde. Quatre cents personnes étaient là, des femmes pour la plupart en robe de dimanche, coiffées de chapeaux cocasses. Personne, sous leurs cheveux peignés, leur peau lavée, leur jaquette à façon, n’aurait reconnu les bambrocheuses, les dévideuses, ni les hercules femelles, à poitrine plate, qui servaient les