Page:Yver - Les Cousins riches.djvu/70

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qui n’avait pas été le sien et dont cependant elle vibrait après trente-deux ans comme une jeune fiancée, Marthe, nourrie de ce beau conte, voulut l’entendre encore.

— Comment n’as-tu pas été effarouchée, ma pauvre mère, de te prêter à cet enlèvement ?

— Ma fille, les choses, à vrai dire, se sont faites toutes seules. Comme tu ne l’ignores pas, la maison blanche où tu travailles maintenant et où loge le directeur a été un peu dégradée par le temps, mais alors que monsieur et madame Béchemel, les beaux-parents de monsieur Xavier, l’habitaient, c’était magnifique, c’était princier. Mademoiselle occupait la chambre au-dessus de ton bureau, et moi, je couchais dans un petit cabinet contigu, puisque j’étais sa bonne particulière. Et la nuit je l’entendais pleurer dans son lit, tant elle était amoureuse de monsieur Xavier dont ses parents ne voulaient pas, vu que c’était un grand noble qui ne connaissait rien à la filature. Mademoiselle était une belle brune, sévère, très dévote, et les Dames de la Visitation de Rodan, qui l’avaient élevée, croyaient bien que leur élève prendrait l’habit chez elles. C’était