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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/106

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Fabrezan, qui avait écouté impassible, promenant ses longs doigts noueux dans ses favoris, prodigieusement intéressé au fond par l’imbroglio de cette affaire, l’arrêta :

— Mais madame, vous avez plaidé ! L’affaire est venue, si je ne me trompe, la semaine dernière, devant la troisième du tribunal ; vous étiez défendue par maître Clémentin et il fut sursis à huitaine pour entendre la partie adverse. Elle le regardait, haletante ; sa main gantée de fil, dont les ongles apparaissaient nus sous les trous, se haussa dans un mouvement de surprise. Ce qu’elle ignorait, c’était le dilettantisme infatigable du bonhomme, son amour des petits procès civils, souvent plus piquants que les grands, et ses flâneries dans les audiences ou il n’avait que faire, mais qu’il fréquentait tout de même, se régalant à l’exposé des causes burlesques, surveillant les jeunes, jurant tout bas aux sottises des vieux incapables, leur soufflant parfois tout haut l’argument qui leur échappait. C’était ainsi que peu de jours auparavant, l’affaire Gévigne l’avait retenu.

— Et, poursuivait-il sévèrement, puisque vous avez un défenseur, madame, je ne vois pas très bien ce qui vous amène chez moi.

— Ah ! maître ! dit la pâle femme aux yeux fous qui rassembla sur ses genoux les plis de sa robe noire élimée, monsieur Clémentin est jeune : je crains qu’il n’ait pas discuté très