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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/115

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dans la vie, prêtes à toutes les éventualités. Que de détresses cela éviterait ! que d’humiliations, de bassesses parfois, même de souillures ! Par exemple, elles devraient toutes demeurer simples, bonnes, gentilles, comme cette petite Vélines dont le mari devait être un heureux mortel ! Et, toutes ces pensées ayant fleuri dans son cerveau ardent d’homme du Midi, le temps qu’Henriette achevait sa copie, quand elle releva la tête, le bâtonnier, oubliant leur procès commun, lui lança :

— Et Vélines, comment va-t-il, chère madame ?… J’espère que vous lui filez des jours de soie ?

— Bien entendu ! répondit-elle ; je l’ai épousé pour lui donner du bonheur, monsieur le bâtonnier. Il me le rend bien. Nous nous aimons.

— Ce doit être joli, je me figure, votre petit ménage d’avocats amour et procédure, rêve et code civil ! On travaille à la même table, on s’interrompt pour un baiser, on commence d’écrire des conclusions, et l’on conclut par des propos avec lesquels notre vieux jargon suranné n’a rien de commun.

Mais Henriette se récria :

— Non, non, monsieur le bâtonnier, détrompez-vous : nous sommes plus sérieux que cela. D’abord chacun de nous conserve son cabinet, et les affaires de l’un ne regardent pas l’autre… Oh ! je sais, vous auriez bien aimé, en plaidant contre moi, à sentir maître Vélines de l’autre côté de la