Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/124

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procès de divorce, ne pensez-vous pas encore aujourd’hui que là, ma pauvre femme cessa d’être irréprochable, lorsqu’elle assimila cette futile inconstance à l’adultère même de l’époux ?… Oh ! ce n’est pas à Suzanne que j’en veux : je suis de sang-froid maintenant, et mets les choses au point ; j’en veux à ces évangélistes nouvelles de la bonre parole féminine, dont elle admirait tant les fières doctrines J’y ai donné moi-même, dans ces théories superbes ; oui, oui, j’y étais pris. Que voulez-vous ! quand Suzanne revenait le soir toute vibrante d’une conférence de votre confrère madame Surgères, par exemple, et qu’elle me redisait ces généreux propos touchant la libération de la femme, la régénération de la femme la justice pour la femme, je me laissais convaincre, je m’emballais aussi… La femme émancipée, la femme dignifiée, notre égale, en ces tièdes soirées de chez nous, sous notre lampe, pour moi, c’était Suzanne, Suzanne lucide et tendre, Suzanne savante et amoureuse, Suzanne si intelligente et si belle, mon camarade, mon associé, l’autre moi-même !… Et je les voyais toutes ainsi à travers elle… Pourquoi faut-il que malgré leur supériorité elles aillent toujours à l’exagération ? À force de se répéter : « Nous valons autant que l’homme », elles en arrivent à ajouter : « Nous sommes pareilles à lui. » Une morale se crée, on en vient à la confusion des tempéraments : les unes permettent à la femme les vices de l’homme, les