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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/13

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reconquis son air d’énergie tranquille, voulez-vous que je vous montre la galerie carrée ?

Avec cette terrible vivacité qui la rajeunissait de quinze ans, la vieille dame aux cheveux noirs gravissait le degré de pierre blanche que domine, au fond de la salle des Pas-Perdus, le balcon aux balustres de marbre. Elle s’y accouda près d’André. Tous deux, un instant, silencieux, contemplèrent l’immense nef bourdonnante.

Dans son architecture nue, vaguement dorique, elle s’allongeait royalement en deux voûtes que séparait une rangée de colonnes. Elle ressemblait, avec les rosaces qui l’éclairaient aux deux bouts. à une cathédrale neigeuse et grouillante où cheminaient des moines noirs au rabat blanc. L’étamine des robes allait, venait, les toques s’agitaient, et ces milliers de chuchotements composaient un unisson formidable qui montait en rumeur, en fracas. Là-haut, on aurait dit le bruit de la mer.

— Oui, reprit madame Mansart en cherchant des yeux parmi la foule bougeante les cheveux blonds de la petite stagiaire, de singulières femmes ! Je ne fus jamais une sotte, mon cher petit, non plus qu’une ignorante ; j’ai lu Virgile, en mon temps : les femmes intelligentes ne datent pas d’aujourd’hui, vois-tu !… Néanmoins, je n’aurais jamais eu l’idée d’acheter une étude d’avoué concurremment avec ton grand’père, ni de faire le même métier que lui… Cette jeune fille est fort distinguée. Son père, monsieur Marca-