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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/143

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citron aux yeux de jais. Mais tous les sentiments s’abolissaient en lui : la main d’Henriette retenant la sienne, sur le drap, lui était une gêne ; ses baisers, une fatigue. La présence de sa grand-mère ne fut guère pour lui qu’une menace de mort, et son indifférence était telle qu’il souhaita d’en finir au plus vite et le balbutia d’une voix sourde, sans pitié pour les deux pauvres cœurs qu’il broyait…

Et ce furent encore trois jours pareils, atroces, sans espoir. Henriette était méconnaissable. Ses cheveux, rattachés sans ordre, déparaient son joli visage tout pâli par l’insomnie. Ses yeux brûlés s’agrandissaient, exprimaient tant de peine qu’on avait déjà devant elle ce respect imprécis, fait de compassion, de tristesse, qu’inspirent les veuves. Madame Marcadieu avait pu venir proposer ses soins elle avait repoussé son ministère comme celui de madame Mansart. Et elle était toujours debout au chevet de son mari, énergique, vigilante, procédant seule aux lavages, aux gargarismes, aux examens de la gorge. La fragilité de son corps résistait à tout, miraculeusement. Elle soignait André avec un zèle morne, presque farouche, avec la conviction de ne le point guérir, avec l’affreux chagrin de voir ce mari s’éteindre insensible, oublieux de leur amour. Madame Mansart et madame Marcadieu, attendries, se cachaient pour pleurer, ne répétaient que cette phrase :