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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/153

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cette voix mâle qui, au début d’une plaidoirie, décelait sa sûreté, sa maîtrise, sa force. En attendant, son cabinet restait fermé, tant il redoutait la tentation de retourner à ses dossiers. Henriette n’avait pas le loisir d’entrer dans le sien. Pourtant toutes les pièces du procès Marty étaient là, avec le plan de sa défense ; souvent elle ouvrait la porte du sanctuaire, un soupir léger sur les lèvres…

Des nuits entières, elle rêvait de la huitième chambre, du petit parquet, de la cour, où elle se voyait plaidant péniblement des causes compliquées. Elle s’ennuyait de ses confrères, de l’animation des Pas Perdus, de ses clients de la Petite Roquette, même de sa robe qu’elle n’avait pas enfilée depuis si longtemps…

Un jour. Vélines s’étant assoupi après le déjeuner, elle n’y tint plus, posa rapidement son chapeau, mit ses gants et partit à la dérobée, disant aux domestiques qu’elle sortait pour un quart d’heure. Si proche d’elle, avec ses frémissements intenses de temple où vit tout un peuple sacerdotal, le Palais l’hypnotisait, la magnétisait : elle y revenait d’instinct, machinalement docile à la domination de cette grande chose impérieuse qu’elle servait. Et, filant le long des maisons de la place, elle gagna la rue de Harlay.

Mais d’abord elle se retint d’entrer, C’était encore un plaisir trop vif, une volupté non per-