Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/177

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percevait les moindres syllabes. L’affaire lut exposée en quelques phrases. Un premier jugement de cette chambre, après le prononcé du divorce, ayant attribué à la mère le mineur issu du mariage, le père réclamait aujourd’hui la direction de cet enfant, parvenu à l’âge des études.

Quand Fabrezan plaidait, on sentait le tribunal tout au plaisir de l’entendre, lui, tout au plaisir de son art. Sa massiveté corporelle s’allégeait. Il souriait en parlant. Sa phrase était inégale et souple, courte ou longue à sa fantaisie. Son coup de hardiesse fut de débuter par l’éloge de madame Marty. On l’aurait pris pour l’avocat de la défenderesse. Il la dépeignit magnifiquement, « portant avec noblesse son divorce comme un veuvage digne, austère, monacal… » Puis il vanta son amour maternel, qui épuisait maintenant à lui seul les suprêmes tendresses de ce cœur de femme ; et alors il risqua cette précaution oratoire que, de l’autre côté de la barre, tout à l’heure, on exploiterait ce sentiment passionné de la mère, on dénoncerait l’inhumanité d’un jugement qui retirerait à cette isolée, éprouvée déjà si cruellement, son dernier bonheur.

— Mais, dites-moi, messieurs, ajouta-t-il aussitôt, si cet isolement, madame Marty ne l’a pas délibérément choisi, impérieusement voulu, en réclamant la rupture d’un lien que son mari, au contraire, la suppliait de renouer.