Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/25

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subitement au souvenir de son petit voleur, elle abaissa les lèvres.

— Pauvre mioche ! Il était délicieux, vous savez ; pas méchant pour deux sous… Ce qu’il a pleuré quand je lui ai montré combien c’était vilain d’avoir dérobé ces boîtes de sardines à un brave épicier !… Enfin j’espère bien qu’il aura le sursis.

Autour de leur groupe, le grand va-et-vient continuait. C’était un remous perpétuel de toques, un papillotage de rabats légers. La chanson sourde des conversations couvrait le bruit de piétinement que faisaient sur le dallage les innombrables chaussures allant en cadence ; on voyait seulement leur mouvement régulier, avec celui des bas de pantalon issus de la robe très courte. Et, selon l’image de madare Mansart, des fortunes s’effondraient, des millions dansaient, des vies humaines se discutaient, ou bien des questions ridiculement petites que deux adversaires débattaient avec des emportements farouches et des jeux de physionomie passionnés un corset mal fait, une carte anonyme, une toiture défectueuse… Au passage, les plus affairés de ces messieurs regardaient les stagiaires, Henriette Marcadieu surtout et Louise Pernette, qui étaient charmantes. Le visage des anciens respirait la mansuétude, celui des célèbres, la bienveillance ; mais les jeunes, âpres guetteurs de causes, dans ce grand vivier qu’est le Palais, où les gros pois-