Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/263

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Néanmoins, il pensait souvent, de lui-même, à ce malheureux incident. Henriette le devinait, à retrouver sur son visage si ouvert, si expressif, où les lèvres rasées ne mentaient point, les contractions douloureuses aperçues ce soir-là…

La presse, vers cette époque fut remplie du nom d’André Vélines. Les débats du procès Abel Lacroix, à la onzième chambre, passionnèrent les curieux. Il dut y avoir, chaque fois, un service d’ordre à la porte de l’étroite salle d’audience, où, malgré une splendide gelée de février, régnait une température étouffante. La personnalité de l’escroc fournit le principal attrait de l’affaire. Dressé au banc des accusés, avec la distinction de sa haute taille, de son pardessus correct, de sa fine tête aux cheveux lustrés, il parlait aux juges sur un ton d’égalité. Le tribunal le traitait avec courtoisie. L’interrogatoire fut une conversation. Comme Vélines, le président sentait en cet homme une supériorité, et n’était pas toujours de force à lui tenir tête. Aux murailles, tapissées de bleu, des abeilles d’or étincelaient. Des boiseries de chêne assombrissaient le prétoire, et, par les larges fenêtres, on apercevait les pinacles de la Sainte-Chapelle qui montaient dans l’azur.

Blondel, qui plaidait pour la partie civile, fut très remarquable. Mais ce qui devait rester légendaire au Palais, c’était la plaidoirie de Vélines, qui dura deux audiences et débutait par cette