Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/30

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Marty n’avait pas eu de chance : Bertigny, qui lui avait obtenu son divorce en juin, était mort pendant les vacances. Elle n’avait pas encore choisi d’autre défenseur, pour une bonne raison, c’est que l’assignation ne l’avait pas encore touchée… Henriette n’était au courant que par les bavardages de Fabrezan, qui lui contait la chose tout à l’heure, quand l’arrivée de mademoiselle Angély les avait séparés.

— Eh ! je savais bien, acheva-t-elle, que monsieur Alembert était en quête du bâtonnier : tenez, il l’a découvert ; il le rejoint ; ils causent.

Et toutes suivaient des yeux l’ingénieur et l’avocat qui, à pas lents, prenaient la file dans la procession générale. Mais aucune ne considérait Alembert avec la pitié, la tristesse, la sympathie qu’exprima subitement le visage fatigué de madame Martinal. Le pauvre homme, dépourvu de tout sang-froid, devait épancher avec des mots de désespoir sa peine paternelle, s’emporter, car le vieil avocat, par instants, lui touchait l’épaule avec ce geste qui veut consoler, apaiser. Et, à d’autres moments, la haute taille du jeune père s’inclinait, sa main se mouvait doucement, comme s’il imaginait près de lui une tête enfantine.

Madame Martinal, elle, songeait à ses trois chéris : l’aîné avait neuf ans maintenant ; il était ardent, imaginatif et câlin : si quelqu’un le lui enlevait !… À cette pensée, son cœur cessait de