Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/308

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Henriette, elle, rayonnait. Sa vie de travailleuse n’était qu’une fête. Elle ne rencontrait que des sourires. Véritablement sa maternité l’avait embellie. Un peu plus pâle, un peu plus grave, sans avoir rien perdu de sa grâce, même au Palais elle se préoccupait de sa fille, s’en glorifiait, dans l’éternelle fierté de l’enfantement et l’étonnement de sa dignité nouvelle. Les confrères, à leur insu, en l’abordant, prenaient une autre attitude : ils voyaient en elle la mère dont l’action créatrice se prolongeait physiologiquement, puisqu’elle nourrissait, et c’était à son front encore une auréole. Beaucoup de ses clientes avaient attendu son rétablissement pour entamer des procès. Dès la fin de mai, elle se mit ardemment à la besogne, et, si chacune de ses causes ne comporta pas un triomphe, si, par leur nature même, la plupart de ses plaidoiries au civil firent peu de bruit, il y eu toujours autour de sa personne une curiosité qui remplissait d’avocats les chambres d’audience, quand l’un d’eux avait dit :

— C’est la petite Vélines qui « cause » là.

Parfois, dans la salle des Pas-Perdus, elle était assaillie à ce point que, presque toujours pressée, elle évitait de la traverser quand elle n’avait rien à faire au tribunal. Mais Vélines, presque toujours oisif, s’y promenait beaucoup ; et il lui arrivait d’apercevoir au loin sa femme arrêtée dans un groupe de dames qui s’accrochaient à elle, ne la quittaient plus, l’escortaient jusqu’au vestiaire.