Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/310

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jadis, une hostilité sourdait du fond de son âme, et c’étaient en lui des montées de colère brutale. Alors il s’enfermait seul dans son cabinet, où il endurait de tels soubresauts du cœur, et si répétés, qu’il put les attribuer à une affection cardiaque Mais il était si las de tout qu’il dédaigna de consulter.

Les tendresses qu’Henriette lai témoignait l’apaisaient : « Qu’elle ne sache rien, mon Dieu ! — soupirait-il, — qu’elle soit heureuse » et ses impérissables appétits de grandeur se satisfaisaient d’une telle abnégation. Ils avaient encore des heures douces, au demeurant : elle n’était point de celles qu’on cesse de chérir en un jour. Son esprit le ravissait encore, et, ce soir-là, tout le long du dîner, elle l’avait déridé en contrefaisant Erambourg, devant qui elle avait plaidé, l’après-midi.

— Que peut me vouloir cette pauvre Martinal à une heure pareille ! — disait-elle en pliant sa serviette ; peut-être est-ce un avis qu’elle vient me demander.

— Oh ! ne put retenir André, madame Martinal est plus vieille procédurière que toi…

Quand elle se vit seule avec son amie, dans ce petit salon du dix-huitième siècle, si propre aux confidences, Jeanne Martinal se troubla un peu. La délicate Henriette s’en aperçut, et, lui serrant la main gentiment :