Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

chez une personne de votre sorte, mademoiselle !… car je n’ignore pas la rare instruction que vous possédez, ni votre talent. Mon petit-fils m’en a parlé.

Emportée par l’enthousiasme, elle ajouta aussitôt :

— Certes, mademoiselle, vos parents sont bien heureux, et j’aimerais à féliciter madame votre mère, si je savais son jour et qu’elle voulut bien me recevoir.

Henriette avait compris elle pâlit et baissa la tête. André Vélines demeurait silencieux ; cependant jamais il n’avait analysé son amour comme alors. Ce n’était plus le goût passager, sensuel ou imaginatif, d’un camarade d’études qui s’éprend d’une « confrère » entre deux plaidoiries, se plaît à égayer d’une légère intrigue la tristesse morne des affaires, quitte à oublier demain le visage favori dont il guettait toujours le profil sur la sombre muraille des salles d’audience. C’était ce don de soi que fait l’homme dans le mariage, le grand abandon de sa liberté, de son cœur, de sa vie, qui rend si précieux à une femme aimée l’acte de la demande. Henriette Marcadieu fut très émue soudain ; elle releva la tête, ses yeux étaient humides, elle dit d’une voix qui s’altérait :

— Je crois que ma mère serait charmée de vous recevoir un jeudi, madame.

Elle savait que les autres démarches seraient