Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/371

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réjouie d’avoir vaincu tous les obstacles qui arrêtent une femme dans la carrière, où serait la faute ?… Avais-je fait vœu de disparaître de ta route ?… Tu m’aimais alors, tu étais fier de mes triomphes : est-ce que je savais qu’il fallait m’éteindre pour te plaire ?

Il se tut, et, renversant à terre les sièges qui le gênaient, fit quelques pas à travers le petit salon. Puis il revint à Henriette, la considéra, et il se repaissait voluptueusement de la débilité de ce corps, de ces épaules étroites, de cette tête fine. Il semblait se dire dans un sentiment de revanche virile : « J’ai possédé tout cela. J’en fus longtemps le maître. » Et la faiblesse physique de cette rivale, dans la crise bestiale qu’il traversait, l’enchantait secrètement.

— Jamais je ne t’ai demandé de disparaître de ma route, de t’éteindre ! gronda-t-il d’une voix sourde. Tu dois reconnaître que j’ai toujours scrupuleusement respecté ton métier. Mais, toi, avec la duplicité des femmes, tu m’assassinais doucement, tu attirais à toi les proies de luxe, tu te contentais de me laisser le fretin dont je végète.

— Moi ? fit-elle, indignée, moi ? Quand ai-je fait cela ?

— Est-ce que tu ne viens pas de le faire, à la minute même ?

— André, murmura-t-elle, désespérée, André, tu es jaloux de moi !

Le mot acheva de l’exaspérer :