Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/38

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dame ; elle remarqua la chaleur de l’étreinte quand sa main nue fut serrée dans les deux mains gantées. Elle se dit : « J’aimerai bien cette bonne grand mère… » Puis, se tournant vers André, elle hésita, un instant. Tous deux éprouvaient un trouble et ils étaient timides l’un devant l’autre. André dit, à la fin, en désignant la première chambre :

— Je vous retrouverai peut-être là, tout à l’heure… Je voudrais y être pour le prononcé du jugement je parierais qu’il sera rendu sur le siège.

Et il la vit traverser le dallage maintenant désert. Les plis d’étamine noire de la toge cachaient la gracilité de son corps André Vélines la trouvait délicate, écrasée comme une frêle vestale sous l’ampleur du Temple Il se souvint de l’avoir entendue plaider avec de jolis mots tendres auxquels souriait le président. Et, pensant que cette pure jeune fille défendrait bientôt, devant la Justice, quelque femme rouée, vicieuse et comme supérieure dans le mal, il fut touché soudain de sa faiblesse. Comme il la protégerait ! comme il la guiderait ! Toute la force qu’il se sentait, force d’éloquence, force virile, force du succès, serait consacrée à cette petite épouse ; il la revêtirait de sa propre célébrité ; et il imagina des triomphes d’audience dont l’orgueil rejaillirait sur elle. La débilité d’Henriette la lui rendait plus chère. Elle croîtrait dans son ombre. Le commun amour de