Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/394

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

si heureuse !… Jamais, jamais, je n’aurais soupçonné maître Vélines de vous faire de la peine. Comment ! lui non plus ne diffère pas des autres ?

— Si… J’aurais préféré qu’il me trompât, mais qu’il m’aimât encore… Il ne m’a pas trompée, mais il ne m’aimait plus ; il n’aimait que le succès. C’était une àme sèche, un ambitieux, rien que cela ; l’ambition le brûlait, le dévorait ; il me haïssait parce que j’avais du talent… Vivre aux côtés de cet homme était indigne de moi : j’ai repris ma liberté.

Madame Marty ne put retenir la phrase obsédante :

— Pourtant, puisqu’il ne vous a pas trompée… Alors Henriette, la regardant fixement, se mit à lui dire d’une voix bizarre l’évangile de l’indulgence :

— Vous ne savez pas ce que c’est, vous, d’être offensée : une femme n’est pas offensée pour avoir été trahie, pour n’être plus aimée. Votre mari ne vous a pas offensée, il vous chérit encore. Si André même avait donné passagèrement son cœur à une autre, et qu’il me fut revenu désolé de son péché, attendri par le remords, comprenant mieux l’union absolue pour y avoir manqué, aspirant à cette grâce conjugale qui entretient la vie intérieure, si suave, des époux, oh ! Suzanne, comme j’aurais pardonné !… Oui, j’imaginais parfois cette faute et la joie de ce premier baiser que la femme accorde ensuite. Quel