Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/415

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— Eh bien ! quoi, mon garçon ? Nous croyiez-vous au Kamtchatka !

Henriette, pendant que la femme de chambre disposait de son mieux, dans les tiroirs de Ja commode, le trousseau du bébé, nouait tranquillement à la flèche du berceau le traditionnel nœud de faille blanche, couronnement de l’ordre rétabli, quand le timbre retentit sous le doigt de Vélines. Tout était prêt : des bûches flambaient dans la cheminée ; dans la salle à manger, le couvert était mis : une odeur de croquettes rissolées s’exhalait de la cuisine : les pièces de procès pendants traînaient sur le bureau d’Henriette… Vélines arrivait avec un air de contentement qui frappa tout le monde. Sa femme et lui s’embrassèrent comme deux bons époux qui se retrouvent, et il manifesta surtout sa joie à revoir sa petite fille, qui se tenait debout sur ses pieds en boule, quand on lui prêtait l’appui de deux doigts : c’était un plaisir pour le père de suivre alors ses trémoussements d’oisillon au bord du nid. Puis Vélines exprima naïvement cette satisfaction de l’homme qui jouit d’être enfin chez lui :

— Ma chère, j’ai faim !

Et. quand ils furent à table, madame Martinal, qui mangeait à peine et l’observait, s’indignait, malgré soi, de son appétit, de sa gaîté, de sa béatitude d’heureux mari reprenant goût au bienêtre de sa maison. En face de lui. Henriette, toute pâlie et ravagée par l’affreuse lutte endurée