Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/440

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cette main de penseur qu’elle avait tant chérie, l’attirait comme une chose indépendante de la personne d’André… Elle se recula un peu, détourna les yeux et dit :

— Tu aurais besoin d’être aidé, toi aussi.

Il riposta :

— Tais-toi donc ! Un secrétaire ? Je me couvrirais de ridicule.

Elle se tut. Mais, dès lors, une idée qu’elle aurait, la veille, jugée absurde, germa dans son esprit et elle l’y entretint comj plaisamment. Dans l’abaissement de son mari, où il y avait une ostentation douloureuse, systématique, la supériorité de Vélines s’affirmait. Ce soir-là, cet homme lui parut subir une formidable injustice de la destinée : elle possédait un cœur trop naturellement sensible pour ne pas s’en émouvoir. L’image de cette charmante Pernette, dévouée assez à celui qu’elle aimait pour consentir à n’être plus que la servante de sa pensée, pour lui assujettir même son propre talent, l’obsédait. Elle croyait voir ces deux beaux amants travaillant à la même table, s’adorant jusque dans le labeur, poursuivant l’unique gloire : celle qui rejaillit de l’époux sur l’épouse. Et elle les envia. Si elle l’avait voulu, pourtant, qui l’eût empêchée elle-même ?…

Sa main s’avança lentement sur le bureau, rejoignit presque l’autre. Puis le souvenir lui revint d’un soir d’été où elle aussi avait assez