Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/69

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préoccupations maternelles. Elle fixa dans l’esprit d’Henriette cette opinion définitive que la femme doit, pour sa dignité, posséder un métier, le moyen de se suffire, de ne tenir, le cas échéant, sa subsistance que d’elle-même.

Le moment vint pour Henriette d’entrer enfin dans l’Ordre. Les parents éprouvèrent alors des appréhensions d’autant plus vives que l’heure décisive était plus imminente. Ils tentèrent un dernier effort pour détourner leur fille de sa vocation.

— Ma pauvre enfant, disait M. Marcadieu, tu sais combien les jeunes hommes ont la défiance des femmes « cérébrales ». C’est presque une renonciation solennelle au mariage qui accompagnera ta prestation de serment.

— Qu’importe ! ripostait la jeune fille ; je ne regretterai pas le mari qui aura négligé dans sa compagne le meilleur d’elle-même, son intelligence. Au contraire, celui-là seul qui m’aimera avocate m’aimera vraiment, et à celui-là seul une femme comme moi pourra donner le bonheur.

— Chère petite ! tu tombes bien dans l’erreur que vous professez toutes ! Une femme peut être intellectuelle sans être avocate, et apporter à son mari toutes les joies de l’esprit sans pratiquer un métier absorbant. Nous t’avons douée de l’instruction d’un homme je ne suis donc pas suspect de bouder la science des femmes. Non, non ! soyez toutes instruites, sachez penser ; mais