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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/101

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Ce jour-là, un jour d’octobre, Brigitte, pressée, déposa Marcelle dans l’ascenseur chez mademoiselle Darche et reprit l’autobus. La petite fille monta seule, sonna comme une grande personne, marcha droit à l’atelier de son amie et en ouvrit la porte.

Dans une chaude lumière blanche, éclatante, un enfant nu, gracieux, aux bras levés, au mouvement vif, aux jambes d’un galbe fin, dressait sa chair blonde. Il posait ainsi sur un tabouret haut, devant Nelly Darche, qui peignait, habillée d’une blouse en percale rouge. Un tapis épais, dont le dessin et la couleur rappelaient ceux de la plume de paon, feutrait les pas. Aux murailles lambrissées de blanc, les toiles rutilantes de l’artiste mettaient leurs taches disparates. Des meubles aux formes étranges, pris à tous les pays, à toutes les époques, garnissaient la grande pièce.

La petite fille s’arrêta net, les yeux rivés à cette nudité qui l’offusquait, l’étonnait, la stupéfiait ; puis son regard erra, fuyant celui de mademoiselle Darche, qui s’écriait :

— Comment, Marcelle ; c’est toi, ma chérie ! tu as bien fait d’entrer, va. Tu vas t’asseoir bien sagement pendant une petite demi-heure, puis je serai à toi.

Et elle continua à jeter de larges touches roses sur la toile, pendant que la fillette restait figée sur le seuil, sans dire un mot, sans faire un pas.

— Avance et ferme la porte, lui dit encore