Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/103

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d’impératrice. Marcelle l’admirait pour les lourdes chimères de bronze doré qui ornaient le lit, les fauteuils, la psyché. Elle se mit à les caresser comme des bêtes vivantes pendant que, devant la glace, mademoiselle Darche défaisait ses cheveux pour les arranger avec un mélange de coquetterie et de vivacité masculine. Elle y mêla des rubans d’or. Avec sa grande bouche si expressive, ses dents éclatantes, ses yeux vacillants de myope, elle avait un attrait excessif d’originalité, de bonne humeur, de passion.

— Ma chérie, si je ne peux te reconduire, à cause de mon ami, le petit peintre qui va venir tout à l’heure, la femme de chambre te remettra quai Malaquais, ce soir.

Elle avait à peine dit cela qu’on frappa, et comme elle demandait qui était là, un tout jeune homme entra sans plus de préambule. Il ne paraissait pas vingt-cinq ans, avait le visage rond et rasé, le teint mat, les yeux ardents. Il s’arrêta stupéfait, consterné même, en voyant Marcelle. Mais la grande Darche présenta l’enfant.

— Vous savez, Fabien, c’est cette petite amie dont je vous ai parlé, la fille des Fontœuvre ; elle est venue goûter avec nous. Passons-nous à la salle à manger ?

Elle le prit par la main, câlinement, en poussant Marcelle devant eux. Sous le linteau de la porte, ils s’embrassèrent furtivement. La table était servie ; une copieuse argenterie et des petits