Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/148

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drames. Il y a une âme dans ces choses, une âme troublante qui fait penser, qui donne le goût de la méditation, de la paix, qui accroît la vie intérieure. On est meilleur, miss Spring, quand on a contemplé vos toiles ; et c’est le signe du grand art. Et quant aux portraits de mademoiselle Arnaud où elle dévoile si discrètement en même temps la misère et la noblesse humaines, je les place si haut qu’elle ne voudrait pas me croire si je le disais. Et je défie un homme qui souffre d’aller méditer devant une de vos figures de femme, si mélancoliques et si empreintes de force douloureuse, sans être consolé. Que demandez-vous d’autre, de plus enorgueillissant, insatiable artiste ?

Elles riaient maintenant de plaisir, de bonheur surhumain ; et avec leur grâce mûre, elles balançaient la tête du même mouvement ondulé que, dans le jardin, la brise imprimait aux acacias argentés.

Les convives prirent congé de bonne heure ; ni Addeghem, ni Juliette Angeloup ne pouvaient plus veiller désormais. Nugues, toujours terrifié par l’idée de sa solitude, accompagnait les Vaupalier pensant qu’il y aurait bien, dans un café du boulevard, une station avec bocks à la clef. Les Fontœuvre rentraient pour coucher les enfants ; l’Anglaise et Synovie avaient peur quand elles revenaient trop tard à leur rue d’Anvers. À dix heures, le père Houchemagne s’étant couché, Nicolas et Jeanne se trouvèrent seuls dans le salon ;