Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/154

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par le bras avec quelque vivacité, et, comme le petit l’énervait par son rire d’indifférence, peu à peu gagné par l’une de ses colères bouillantes d’homme du Midi, il l’avait frappé. Aussitôt, l’attitude ironique de l’enfant s’était métamorphosée. Contenant avec peine l’émoi physique où l’avait mis ce soufflet, blême d’indignation haineuse, tout son orgueil révolté, il avait dit : « Ne recommence pas, ou je me défends ; tu n’as guère le droit d’ailleurs de te montrer implacable, si le travail m’embête, car toi, dans ta jeunesse, tu n’as rien fait. Je te l’ai entendu dire souvent devant monsieur Nugues ou mademoiselle Darche. Tu me parles sans cesse de gagner ma vie ; est-ce que tu la gagnes, toi, la tienne et la nôtre à tous ? Maman est sans cesse à tirer le diable par la queue. J’en saurai toujours assez long pour en arriver là, et si jamais je suis peintre, j’aurai toujours autant de talent que toi, va ! Je sais bien ce que mes camarades disent de toi, au lycée, je les ai entendus : ils disent que tu peins des chevaux de bois ! »

Il se tut, content de ce dernier trait, et assez vengé désormais pour reprendre son petit rire. Le pauvre Fontœuvre aurait bien voulu, sous l’influence du premier mouvement, répondre à ce discours par une vigoureuse correction ; et puis, cette riposte de François, cette manière d’être filiale qui consistait à traiter son père d’égal à égal, l’emplissait d’un étonnement qui frisait l’admiration. Les enfants, après tout, ne sont pas d’une