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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/161

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Houchemagne indiqua du doigt le contour, d’une délicatesse incomparable, des joues et du menton. Marcelle devint écarlate.

À deux heures, l’escalier peu à peu s’emplit. La foule arrivait. Des groupes se succédaient devant la Sainte Agnès. On entendait des exclamations. Deux critiques discutèrent à voix haute. Houchemagne maintenant s’épanchait, racontait la lente préparation de son œuvre, les quinze figures qu’il avait dessinées préalablement avant de se fixer à celle-là ; les études d’intérieurs antiques qu’il avait faites des yeux à Pompéi ; les stations aux catacombes où il avait cherché la nature de sa petite sainte.

— C’est égal, dit la grande Darche, elle est joliment cruelle. Pourquoi cette inutile vertu, bon Dieu !

Houchemagne bondit :

— Pourquoi ? pourquoi ? mais pour que ce niveau de pureté absolue fût une fois atteint par une âme, pour qu’en sa personne l’humanité se soit une fois haussée jusque-là, et que le souvenir pût en rester dans l’histoire comme une réhabilitation et aussi comme un idéal. Vous voyez bien que mon œuvre est ratée, car si elle avait été selon mon désir, on se serait arrêté conquis devant cette vision de blancheur, la foule aurait eu honte de ses turpitudes, on n’aurait pas demandé pourquoi cette surélévation dans la spiritualité ! Et peu à peu repris par la flamme de sa con-