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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/162

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ception, il contait avec délice l’histoire de sa petite sainte, la colère du Préfet de Rome dont le fils avait été repoussé, l’arrestation d’Agnès. Elle est exposée toute nue dans une maison impure ; aussitôt ses beaux cheveux, retombant sur ses épaules, croissent jusqu’à ses pieds, lui font une tunique soyeuse. Elle est conduite au bûcher ; les flammes s’écartent d’elle et la respectent. Enfin le bourreau lui tranche la tête. Et cela, Nicolas le disait avec des larmes, comme si l’enfant qu’il aimait eût péri là, devant lui, et qu’il eût vu sa petite tête rouler dans un flot de sang.

— Vous permettez ? demandait de temps à autre Addeghem, qui, le stylographe à la main, prenait des notes pour son article du lendemain.

Le succès de Nicolas fut colossal. Il n’eut pas de récompense, car le président du Jury et deux autres membres se trouvant voltairiens, le sujet du tableau leur déplut. Mais ce sujet fut reproduit à l’infini dans les journaux, dans les revues, dans les magazines. Chaque jour des journalistes, heureux de découvrir un chef d’école, venaient sonner au pavillon de la rue Visconti ; on voulait interviewer Houchemagne, « le puissant Houchemagne », comme il fut alors appelé. C’était plaisir de voir créer un genre par quelqu’un qui en avait la force, et Nicolas Houchemagne, affirmaient les critiques, était de taille à supporter l’édifice de son système. Chez les Fontœuvre, on disait quelque-