Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/168

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la peinture ? Non, mon petit, va, je travaille par devoir.

— Oh ! le devoir !… Encore une balançoire ! Si je peux gagner ma vie avec le minimum de travail, je t’assure que je me moque bien que ce soit un devoir de travailler. D’abord, je veux être courtier en peaux d’Amérique, comme le père d’un de mes camarades qui est riche à millions.

— Courtier en peaux d’Amérique ! répéta la petite Fontœuvre, reprise du même fou rire qu’à la pensée de voir sa fille pharmacienne.

— Et Marcelle ? dit à son tour Pierre Fontœuvre, qu’en ferons-nous ?

Le moment était venu de parler en conseil de famille. Pourtant la petite fille éprouvait une difficulté si grande à révéler quelque chose de soi, qu’elle allait se taire encore, quand madame Fontœuvre déclara légèrement :

— Marcelle n’a aucune aptitude spéciale ; nous la mettrons dans les Postes.

— Non, dit Marcelle tout net, j’entrerai aux Beaux-Arts.

— Aux Beaux-Arts ! tu es folle, s’écria la mère.

— Pour crever de faim ? lança crûment Pierre Fontœuvre.

— On ne s’improvise pas artiste quand on n’est pas doué, observa Jenny.

Marcelle sentait sa passion naissante s’affirmer en face de la contradiction ; elle revit les toiles